Depuis le 01 octobre 1911, les entrainements ont repris sur la prairie d’Amont. Le bureau décide d’engager une quatrième équipe composée en grande partie d’anciens minimes et une cinquième est en formation.

Le début de la saison voit une équipe encore en rodage. La saison est lancée avec la réception du S.A. Rochefort, le 29 octobre 1911. Les pluies qui ne cessent de tomber depuis plusieurs jours ont retardé les travaux du Parc des sports. Le match a lieu devant une affluence considérable.

L’équipe est en forme quoique le jeu ne soit pas encore parfait. Percy BUSH éblouit toujours le public. 

"Quand cet homme veut s’employer à fond, il double la valeur de l’équipe." [1]

Le 1er novembre est un grand jour pour le développement de notre club. Soucieux de donner une grande fête pour l’ouverture du Parc des Sports, Pascal LAPORTE a demandé à son ami Frantz REICHEL de venir avec son équipe du S.C.U.F. qui a été battue en finale de la saison 1910-1911 contre le S.B.U.C.

Les prix de places n’ont pas évolué malgré le confort du nouveau stade: troisièmes: 50 Centimes, secondes: 2 F. et premières: 3 F.

Pour fêter cette ouverture, l’administration du Parc offre un joli bouquet aux cinq cents premières dames.

"C’est là une délicate attention à laquelle les spectatrices seront assurément très sensibles." [2]

Une foule évaluée entre quatre et cinq mille personnes a envahi les tribunes et vibre aux exploits de ses protégés. Le S.N.U.C. gagne ce match et rassure ses supporteurs pour la saison dans ce match arbitré par Yves THOMAS.

Le 05 novembre 1911, pour recevoir le Stade Rochelais, des modifications sont apportées au Parc des sports pour le confort des spectateurs. La pluie, qui était tombée pendant deux jours, avait rendu le terrain lourd et glissant. Mais le correspondant du phare fait la remarque suivante :

"Nous tenons à signaler pour la bonne tenue de notre grand club que, si quelques équipiers se faisaient remarquer par la propreté de leurs culottes ou maillots, quelques autres n’étaient pas convenables. L’excuse, qu’ils étaient tous boueux un quart d'heure après, n’existe pas et rien ne produit meilleure impression sur le public que l’entrée sur le terrain avec un équipement parfaitement nettoyé. IL y a une question d’amour-propre personnel pour les équipiers et de renom pour la société. On fera bien d’y veiller."[3]

Le 12 novembre 1911, le S.N.U.C. se déplace au Havre. Après un voyage de 18 heures, l’équipe arriva à 13 h 35 avec un retard de 30 minutes. Ce retard ne permit pas de jouer le temps réglementaire, car le match était joué en lever de rideau du championnat d’association entre Le Havre Athlétique Club et Le Havre Sport qui devait commencer impérativement à 3 heures.

La semaine suivante, pour la première fois, les Nantais accueillent la meilleure équipe basque : l’Aviron Bayonnais Les tribunes sont pleines et les derniers arrivants ont de la peine à trouver une place.

"Les toilettes magnifiques des dames, très nombreuses, sont venues confirmer, une fois de plus, que les grandes réunions du S.N.U.C sont devenues des événements mondains." [4]

Le 26 novembre 1911, le championnat de l’Atlantique est lancé, mais les championnats régionaux ne soulèvent pas les passions comme les années précédentes. Séparés de la Rochelle, Cognac et Rochefort, le S.N.U.C. et le F.C.Yonnais sont véritablement  les seuls à pouvoir gagner ce championnat. Pourtant, il ne se déplace pas pour ce premier match et déclare forfait.

Le 03 décembre 1911, les Nantais se déplacent dans la ville rose pour rencontrer le Stade Toulousain. Le trajet est harassant. L’équipe fatiguée par un voyage de 14 heures de train (parti samedi soir à 10 heures, arrivé à Toulouse à à midi) ,devant 5 000 spectateurs, se fait battre dans les arrêts de jeu par un drop-goal de JAUREGUY 16 à 13. Le drop-goal à cette époque valait 4 points. BUSH fut le roi du match, c’est grâce à lui que deux des essais furent marqués.

Le 17 décembre 1911, la commission de rugby de l’U.S.F.S.A réunissant les meilleurs joueurs de clubs en vue de composer l’équipe de France contre l’Irlande organise un match Possibles contre Probables au Parc des Princes. Un Nantais fait partie de l’équipe des Possibles, il s’agit du trois-quarts aile HERVOCHE dit HAECKER..

Le Parc des Sports a besoin de travaux. Le mauvais temps depuis un mois n’arrange pas la qualité du terrain de jeu qui est transformé en marécage.

Pour l’inauguration officielle du magnifique Parc des Sports, le S.N.U.C a choisi une équipe britannique: OXFORD qui, tous les ans, s’affronte contre l’Université de Cambridge. Des contacts nés de relations personnelles avec les dirigeants du S.N.U.C ont permis aux étudiants anglais d’organiser un match de rugby à Nantes.

Le comité du Parc des sports a fait établir des abris partout. Les tribunes des secondes ont été agrandies et élargies, de manière à pouvoir contenir au moins 800 places complètement couvertes. Il est à noter que pour la première fois des places numérotées sont en location au prix de 3,50 Fr et des chaises réservées et numérotées au prix de 4 Fr.

AUZANET du S.N.U.C joue avec les Anglais, car l’un d’eux O. CALLAGHAN a raté son train à Londres.

Devant un public, estimé à plus de 3 500 personnes enthousiasmées par le spectacle, a applaudi à la victoire de leurs protégés et du joueur « insaisissable » Percy BUSH. Les Snucistes arboraient un beau jeu de maillots neufs offert par M. BLOT du magasin Les Sports 34, rue du Calvaire.

Un banquet, réunissant les deux équipes, est donné en présence de toutes les personnalités nantaises à l’Hôtel de Bretagne. Le président du S.N.U.C Rugby, Pascal LAPORTE dans la langue de Shakespeare, qu’il a su maitriser lors de son séjour en Angleterre, remercie ses hôtes pour le bon comportement de leur équipe.

Il est à noter que M. Louis ELUERE est président du S.N.U.C général et aussi président du Comité des Parcs des Sports.

M. BELLAMY, maire de Nantes, dans son allocution au banquet, souligne les éléments suivants:

"L’initiative prise par M. ELUERE, DOCEUL et leurs amis est un acte d’énergie. Leur œuvre doit obtenir les meilleurs résultats et nous devons de lui apporter notre concours, car nous n’avons pas seulement l’ambition d’aider au développement des arts, du travail et de la pensée, de faire de Nantes, un centre intellectuel, industriel et commercial, nous avons aussi l’ambition d’en faire un centre sportif et de démontrer que la race bretonne, race lente mais persévérante, est capable de faire sur ce terrain encore, l’effort nécessaire pour se pousser au premier rang."[5]

Les équipiers premiers à la fin de cette année décident de passer les fêtes au pays basque. Ils rencontrent le 31 décembre 1911 : l’Aviron Bayonnais et le 01 janvier 1912 : U.S.Dax.

Bien que handicapé par un voyage éprouvant, l’absence d’équipiers premiers et un arbitrage partial, le S.N.U.C s’impose devant l’Aviron Bayonnais. On remarquera dans la composition de l’équipe trois anglais qui étaient dans la composition de l’équipe d’OXFORD et qui sont restés avec l’équipe du S.N.U.C pour ce déplacement. Contre Dax, les deux essais victorieux sont marqués par les deux anglais CLOCK et ADAMS.

Le 28 janvier 1912, le S.N.U.C privé de Percy BUSH se déplace à Lyon. Les deux mille spectateurs sont déçus de ne pas voir l’étoile galloise. Le match se termine sur un 0 à 0.

Le froid règne dans la région nantaise et les terrains sont gelés. Pour la réception du Bordeaux Étudiant Club, le 04 février 1912, l’arbitre M. LEYSHON autorise les deux équipes à jouer le match malgré un terrain durci par le gel. Les capitaines s’entendent pour qu’il n’y ait pas de plaquages.

Le public des troisièmes et des secondes, mécontents du spectacle qui leur est montré, siffle et hue les acteurs. Certains demanderont le remboursement de leur billet d’entrée.

La saison est bien avancée. Le S.N.U.C qualifie ses trois équipes pour les quarts de finale du Championnat de France.

Le 03 mars 1912, pour la deuxième année consécutive, le S.N.U.C se trouve en quart de finale du championnat de France contre son vieux rival : le Stade Bordelais.

Le match a attiré une foule énorme estimée à près de 10 000 personnes. Le match était dirigé par l’excellent arbitre M. RUTHERFORD. Une glissade de l’arrière nantais TARDIERES dans son en-but donne la victoire aux Bordelais. Il est à remarquer que les deux essais marqués par Percy BUSH pour le S.N.U.C et W. MORGAN pour le S.B.U.C sont tous les deux des anciens de Cardiff et jouaient ensemble dans l’Équipe nationale du Pays de Galles au poste de demi d’ouverture et de demi de mêlée.

"Nantais, mes amis, ne vous découragez pas. Je ne vous dirai point que votre équipe a été la gagnante « morale » du match. Non, j’ai horreur de ces sortes d’aphorismes. Je vous dirai seulement que vous deviez gagner, que vous méritiez gagner." [6]

La France du Sud-Ouest écrit:

"Les Nantais ont fait d’énormes progrès et leur équipe est certainement une des meilleures de France. Leur supériorité en arrière fut incontestable, et pendant toute la partie, ils dominèrent leurs adversaires bordelais. Malheureusement, les attaques très rapides manquaient de précision."

LACASSAGNE, le capitaine perdant du S.N.U.C et vexé de cette défaite lance un défi à son ancienne équipe pour une revanche à Bordeaux et souhaite que la recette soit affectée à l’achat d’un avion pour l’armée française. Le journal "La petite Gironde" souligne cette patriotique initiative.

Enfin, le Comité du S.N.U.C se faisant l’interprète du club communique:

"Adresse aux vaillants athlètes du S.N.U.C, ses plus sincères remerciements pour avoir si courageusement défendu les couleurs du Club au cours des matchs de championnat du 3 mars.

Regrette que la chance ne les ait pas secondés dans leurs efforts et ne leur ait pas permis d’obtenir la récompense qu’ils méritaient.

Affirme son entière confiance en tous et les assure qu’il fera tout ce qu’il lui sera possible pour que les espoirs de tous se prennent conscience de cela, enfin, la saison prochaine étant assurée que, pour arriver à ce but, il faut compter sur tout leur courage et leur énergie.

Le Comité du S.N.U.C.

Le S.B.U.C sera opposé au Racing Club de France en demi-finale. Il sera battu par le RC France qui, à son tour, sera battu en finale par le Stade Toulousain. Il est à noter qu’un ancien Nantais évolue au RC FRANCE : R. GRIFFITHS.

Les équipes 2 et 3 sont aussi éliminées par les équipes du S.B.U.C.

La saison n’est pas terminée et le 24 mars 1912, le bureau reçoit une bonne nouvelle de l’USFSA. Hélier TILH, sociétaire du S.N.U.C est sélectionné pour la première fois en équipe de France pour rencontrer le Pays de Galles à Newport.[7]

LAPORTE, soucieux de terminer cette magnifique saison de la meilleure façon, accueille pour le week-end de Pâques, au Parc des Sports, l’équipe britannique du Leicestershire Rugby Union. Ils arrivent le samedi soir et sont accueillis par bon nombre d’équipiers des différentes équipes du S.N.U.C. Nos Nantais gagnent le dimanche 20 à 11 et le lundi 11 à 9.

Le dimanche matin, les deux équipes se retrouvent sur le bateau vapeur quai Ceineray pour une excursion sur l’Erdre jusqu’à Sucé. Le soir, après le match, tout le monde se retrouve chez Mauduit pour un banquet copieux et plein de gaieté.

Cette saison est une des plus belles et LAPORTE va faire son  possible pour améliorer encore son équipe.

"L’association ne jouit pas de la même faveur que le rugby auprès du public nantais, nous imitons en cela les Bordelais et cette tendance vers le ballon ovale se retrouve chez la plupart des jeunes garçons qui se mettent à pratiquer le football. On en trouve dix qui préfèrent le rugby pour un l’association.

Toutes les régions ne sont pas semblables à la nôtre, l’association est préférée en Bretagne, en Normandie dans le Nord et l’est de la France, à Paris même.

Pratiqué à Nantes de 1900 à 1902, avant le rugby, il fut délaissé pour ce dernier lors de la fondation du Comité de l’Atlantique qui retirait Nantes de la Bretagne et l’attachait aux départements du Sud. Il fallut l’apparition du S.N.U.C pour lui donner une nouvelle vigueur. On n’a pas oublié les saisons remarquables fournies par les équipes de 1909 et 1910, la première ayant participé aux championnats de France jusqu’à un quart de finale.

Les équipes sont souvent formées de militaires effectuant leur service militaire à Nantes ou des jeunes de passage à Nantes." [8]